Vers le tout « privatisation » de la santé

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Arnaud de la Salle

Le ministre des Finances du Québec Carlos Leitao affirmait lors d’une allocution début novembre  que certains services de santé et d’éducation pourraient être

Arnaud de la Salle

Le ministre des Finances du Québec Carlos Leitao affirmait lors d’une allocution début novembre  que certains services de santé et d’éducation pourraient être
dispensés plus efficacement s’ils étaient notamment pris en charge par le privé. Un vent de panique n’a pas tardé à s’installer et les critiques ont fusé, craignant que la recherche de profit ne serve pas l’intérêt public. Cette crainte est-elle fondée?
Selon une nouvelle étude publiée par l’IEDM(l’institut économique de Montréal), les expériences étrangères montrent au contraire qu’une implication du privé dans la gestion d’hôpitaux ou de cliniques peut contribuer grandement à obtenir des gains d’efficacité, à réduire les coûts, à améliorer les services et à diminuer les temps d’attente.
Sans compromettre le principe
d’universalité selon lequel chacun peut se faire soigner indépendamment de ses revenus, l’IEDM propose de s’inspirer des expériences de certains pays européens afin d’élargir l’offre de services. Les
solutions à mettre en place seraient basées sur des mécanismes de marché où offrir un service de qualité supérieure aux patients est au cœur du succès.
« Plusieurs détracteurs du privé en santé prétendent qu’il en coûterait plus cher de financer des services fournis par des entreprises privées. Or, le mécanisme crucial dont il faut tenir compte est que c’est justement cette recherche de profit qui incite les fournisseurs de services à accroître leur efficacité et à abaisser les coûts », explique Yanick Labrie, auteur de l’étude.
Nombreux sont ceux qui entretiennent des croyances selon lesquelles la recherche de profit inciterait les établissements à arrondir les angles ou découragerait les médecins de soigner des cas plus complexes, tout cela dans le but d’économiser. Pourtant, les revenus des établissements de santé sous gestion privée dépendent du nombre de patients qu’ils attirent. Dans un contexte de concurrence où l’argent suit le patient, les hôpitaux qui rognent sur la qualité des services font fuir leurs clients et ne peuvent pas faire de profit.
En Europe, le groupe Capio,
responsable de la gestion d’une
soixantaine d’hôpitaux et de cliniques, illustre de manière éloquente la
cohabitation harmonieuse entre le privé et le public. L’entreprise a réussi à augmenter grandement la qualité des services malgré un financement public moindre que celui des hôpitaux publics comparables. L’hôpital Saint-Göran qu’elle gère à Stockholm figure parmi les meilleurs
hôpitaux de Suède en ce qui concerne la qualité, la sécurité des soins et la rapidité d’accès. Alors que l’attente dans les urgences du Québec constitue, comme on le sait, un problème criant depuis plusieurs années, la durée d’attente à l’urgence de l’hôpital Saint-Göran s’élève à 42 minutes en moyenne, comparativement à 57
minutes dans l’ensemble de la Suède.
« Les mythes et croyances négatives sur la place du privé en santé sont un véritable obstacle à l’amélioration de notre système de santé. Alors que les Canadiens
consacrent des fonds publics de plus en plus considérables à ce secteur, ils ont un système de santé qui ne répond pas à leurs besoins. Des solutions existent et il faut arrêter d’accepter l’inacceptable », conclut Michel Kelly-Gagnon, président et directeur général de l’IEDM.