Le labo nucléaire conteste l’ordre de consulter
Sophie Demers
Publié dans le Journal du Pontiac le 9 avril 2025.
OTTAWA – Les Laboratoires nucléaires canadiens (LNC) ont interjeté appel de la décision rendue le 19 février par la juge Julie Blackhawk de la Cour fédérale, qui a jugé inadéquate la consultation menée par LNC auprès de la Première Nation de Kebaowek. Cette consultation portait sur le projet d’installation de gestion des déchets près de la surface (IGDPS) à Chalk River.
La cour a ordonné à LNC et à la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN) de reprendre la consultation avec la Première Nation de Kebaowek. Le jugement souligne que le processus doit être conforme à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA) et respecter le principe du consentement libre, préalable et éclairé (CLPE).
La nouvelle consultation devait initialement être complétée d’ici la fin septembre 2026. LNC cherche maintenant à faire annuler cette décision.
« Cet appel est décevant, mais pas surprenant, a déclaré le chef de la Première Nation de Kebaowek, Lance Haymond. Depuis le début, LNC essaie de faire avancer ce projet sans nous consulter adéquatement. Le tribunal a reconnu que cette approche est inacceptable. Et pourtant, LNC préfère passer son temps devant les tribunaux plutôt que de nous consulter. Nous continuerons à nous battre pour faire respecter nos droits et protéger la rivière des Outaouais. »
Ce n’est pas la première bataille judiciaire entre les deux parties. La Première Nation de Kebaowek avait déjà contesté le permis relatif aux espèces en péril de l’IGDPS et obtenu son annulation. Selon le chef Haymond, la communauté s’oppose depuis longtemps au projet en raison des risques environnementaux.
Interrogé au sujet de l’appel, un porte-parole de LNC a déclaré : « LNC demeure pleinement engagé envers la réconciliation avec les nations autochtones. En ce qui concerne l’IGDPS, nos activités de mobilisation au cours des huit dernières années ont inclus toutes les communautés et organisations autochtones qui ont manifesté de l’intérêt pour le projet. Toutes ces démarches sont menées dans un esprit de collaboration
et de respect mutuel, avec pour objectif la participation continue et la construction de relations durables. »
LNC affirme que l’appel a été déposé afin de clarifier le « paysage juridique en évolution ». L’organisation indique qu’elle travaille activement à la reprise de la consultation avec la Première Nation de Kebaowek et qu’elle maintient sa confiance dans la science qui sous-tend le projet d’IGDPS.
Le chef Haymond souligne que, bien que d’autres groupes autochtones aient pu être consultés, ils ne détiennent pas de droits ancestraux sur le territoire. « Les véritables détenteurs de droits sont les Algonquins Anishinaabeg, que je représente. Ils s’opposent fermement au projet. »
« LNC dit les bonnes choses, mais ses actions ne reflètent pas ce qu’elle affirme publiquement, ajoute le chef Haymond. LNC dit vouloir collaborer avec nous, mais elle a annulé nos trois dernières rencontres mensuelles. Notre relation avec LNC n’a été qu’une suite de difficultés. »
Selon le chef Haymond, les gestes posés par LNC n’ont fait que renforcer la détermination de la Première Nation. « Plus que jamais, nous avons besoin du soutien du public pour faire entendre les voix autochtones et protéger la rivière des Outaouais. Nous encourageons tout le monde à appuyer la campagne RAVEN de la Première Nation de Kebaowek (https://raventrust.com/campaigns/ kebaowek) et à contribuer à cette lutte essentielle. »
Pour en savoir plus sur le projet d’IGDPS des LNC : www.cnl.ca.