Dominique Bowmans
Éditorialiste Invitée
Guest Editorialist
Dominique Bowmans
Éditorialiste Invitée
Guest Editorialist
Je ne suis pas sur Facebook, sur Twitter, sur Instagram ou autres réseaux sociaux. Je sais qu’en disant cela, je fais bien entendu partie de l’espèce des dinosaures qui ne peuvent plus être en voie d’extinction puisqu’ils ont déjà disparu. Bien sûr, c’est un petit peu comme ça que je me sens dans ce monde où la technologie nous accompagne à chaque instant dans le postulat de plus en plus déclaré de ne plus jamais nous quitter. Il m’arrive aussi de regretter mes choix quand, perdue au milieu de nulle part, j’aimerais consulter mon service Internet ou téléphoner – que dis-je ? – texter que je ne pourrai pas être là quand j’étais censée l’être.
J’utilise pourtant la technologie à la journée longue et je communique par le biais d’Internet depuis bien longtemps déjà; je ne ressens juste pas le besoin ni l’envie de m’emprisonner dans des relations sociales qui pourraient me
joindre à chaque instant et à qui je pourrais communiquer mes états d’âme instantanément et finalement assez superficiellement. Je ne dis pas non plus que c’est ce que font les gens de leurs usages quotidiens de la technologie… Je dis juste que je pense tellement que c’est ce que je finirais par en faire que cela ne me tente vraiment pas d’essayer.
J’ai déjà perdu de nombreuses heures sur le Facebook de mon conjoint à regarder
s’étaler sous mes yeux la vie de bon nombre de personnes, certaines que je connaissais et d’autres qui m’étaient totalement inconnues, mes grands amis Facebook, enfin plutôt ceux de mon conjoint en fait. Okay, il faut bien
reconnaître que déjà, dans la « vraie vie », je suis un peu exclusive quant à mes relations et donc, tout cela pourrait paraître un peu extrême, si ce n’était du discours ambiant de bon nombre de gens qui semblent, aujourd’hui, incapables de se passer de leurs réseaux (ne fut-ce qu’une minute) et qui ne semblent pourtant pas plus entourés d’amis qu’auparavant (selon leurs dires, et non les miens). D’un point de vue social, il me semble donc que selon les usages qui sont faits de la technologie, il y a peut-être des questions à se poser qui sembleraient d’ailleurs que l’on se pose déjà.
Il est clair que j’ai un parti pris concernant les réseaux sociaux et si je ne cherche pas à l’imposer, je pense tout de même que le voyeurisme que l’on apprend implicitement dès le plus jeune âge à nos enfants, faisant souvent fi d’une éducation éthique des différents usages de la technologie, nous mènent parfois à des extrémités anti-sociales.
Lorsque le terroriste responsable de l’attentat de Christchurch a décidé de filmer en direct la tuerie de dizaines de personnes, c’est sans doute sur ce voyeurisme malsain des gens qu’il comptait, ce voyeurisme que d’aucuns reprochent aux médias qui semblent pourtant répondre aux besoins de millions de personnes de s’informer en direct de la façon de tuer des gens… Le fait de voir de tels attentats se perpétrer sous nos yeux nous permet-il de comprendre quelque chose de la nature humaine ? Peut-être… Mais le fait de voir autant de gens se complaire dans le visionnement de tueries en direct m’en apprend certainement davantage. Je suis convaincue que là aussi, la technologie décuple les possibilités.