Naviguer les tarifs douaniers : un économiste expose les impacts possibles
Bonnie James
Publié dans le Journal du Pontiac le 9 avril 2025.
FORT-COULONGE – Environ 30 personnes se sont réunies au Café Downtown le 26 mars pour assister à une présentation de M. Pedro Antunes, économiste en chef du Conference Board of Canada, sur les conséquences des tarifs douaniers imposés par les États-Unis. L’événement était organisé par la Chambre de commerce du Pontiac, la SADC et la MRC.
M. Antunes a commencé par expliquer la logique derrière la stratégie tarifaire du président américain Donald Trump. Depuis son premier mandat en 2016, le président Trump s’est attaqué au déficit commercial avec le Canada. Essentiellement, le Canada exporte plus de biens vers les États-Unis que l’inverse, ce que le président Trump considère comme un désavantage pour son pays. Il estime que les tarifs inciteront les entreprises à rapatrier leur production et leurs investissements aux États-Unis.
Alors que la plupart des économistes appuient le libre-échange, le conseiller économique actuel du président Trump, M. Stephen Miran, le considère comme défavorable. Il soutient que les tarifs n’endommageront pas l’économie, car ils feront baisser la valeur du dollar américain, atténuant ainsi les effets négatifs et stimulant l’investissement intérieur sans provoquer de récession.
M. Antunes a suggéré que cette approche pourrait être davantage une tactique stratégique qu’une véritable menace. Il a rappelé qu’en 2016, le président Trump avait utilisé les tarifs pour forcer la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), mais que les mesures avaient été abandonnées dans l’année suivante et que les relations commerciales s’étaient stabilisées.
Cela dit, M. Antunes a signalé deux enjeux majeurs auxquels les États-Unis font face en 2025 : la nécessité de rapatrier les investissements et un déficit fédéral de 2 000 milliards $ US. Dans ce contexte, les tarifs pourraient servir à générer des revenus, d’autant plus que la réduction des dépenses publiques ne suffirait pas à combler l’écart.
Concernant le Canada, M. Antunes a expliqué que plus de la moitié des exportations canadiennes vers les États-Unis sont des matières premières telles que le
pétrole, l’électricité, la potasse et les métaux. Il est peu probable que ces produits soient visés par des tarifs, car cela ferait grimper les coûts de production américains
et alimenterait l’inflation. En revanche, les tarifs sur l’aluminium, le bois d’œuvre et les métaux seraient « très dommageables ».
Il a averti qu’un tarif de 25 %, même temporaire, paralyserait la majorité du secteur manufacturier canadien. Imposé pendant un trimestre, un tel tarif coûterait 35 milliards $ à l’économie canadienne (1,3 %) et entraînerait la perte de 136 000 emplois. Sur une année,
l’inflation pourrait augmenter de 0,7 %, et le dollar canadien pourrait chuter à 64 cents US—ce qui, ironiquement, atténuerait quelque peu l’impact pour les exportateurs.
« Plus les tarifs durent, plus les conséquences seront graves. Un trimestre, c’est une baisse de 0,4 % de l’économie. Quatre trimestres, et on parle d’une récession », a déclaré M. Antunes. M. Trefor Munn-Venn de la ferme Leystone a demandé quels seraient les effets sur l’agriculture. M. Antunes a répondu que cela dépendrait du type d’entreprise et du marché visé. Il a encouragé les producteurs à tirer parti de la tendance à acheter canadien et à faire pression pour éliminer les barrières commerciales interprovinciales.
Il a reconnu que l’accès au marché américain deviendrait plus difficile, mais a souligné l’existence de nouvelles occasions.
Pour répondre efficacement, M. Antunes a recommandé au Canada de diversifier ses échanges à l’aide d’accords bilatéraux, d’augmenter les dépenses en défense afin de stimuler la croissance par les achats militaires, de réformer le système fiscal pour attirer l’investissement privé, de supprimer les barrières commerciales interprovinciales, et d’investir dans les secteurs du savoir comme les services financiers, le génie et l’intelligence artificielle.
Pour les petites entreprises, il a conseillé de revoir leur chaîne d’approvisionnement, d’accumuler des stocks à l’avance et de diversifier leurs fournisseurs. Il a aussi
suggéré de renforcer les réseaux locaux, de collaborer pour des achats en gros, de comprendre qui paie les tarifs, et de surveiller les risques liés au taux de change. Il a encouragé les entreprises à profiter de l’élan pour l’achat local, à utiliser les plateformes de vente directe, à explorer de nouveaux marchés d’exportation et à faire appel aux
programmes de soutien gouvernementaux.
L’événement s’est terminé par des discussions en petits groupes sur les mesures que les entreprises prennent actuellement et celles qu’elles pourraient envisager en réponse aux tarifs