Allyson Beauregard
MRC PONTIAC & PONTIAC – Les photos de lits de rivières asséchés
Allyson Beauregard
MRC PONTIAC & PONTIAC – Les photos de lits de rivières asséchés
en amont ont provoqué l’indignation des résidents de la MRC de Pontiac et de la municipalité de Pontiac, où de nombreuses propriétés ont été submergées le long du secteur riverain au cours des derniers mois. Ces photos ont provoqué des spéculations sur la mauvaise gestion de la Commission de planification de la
régularisation de la rivière des Outaouais (CPRRO). Plusieurs des photos pro-viennent de Deux-Rivières (Ont.), une communauté en amont du barrage/réservoir des Rapides-des-Joachims, et montrent de grandes étendues de terre sèche autour des quais.
Michael Sarich, ingénieur principal en ressources en eau à la CPRRO, a tenté
d’expliquer le phénomène qui n’est pas, selon lui, aussi simple que de mettre plus d’eau à certains endroits et d’en enlever à d’autres.
« Vous ne voulez pas que quelqu’un prenne ce genre de décisions, en disant:
‘retenez l’eau en amont et cela va nuire à ceux qui se trouvent en amont, mais cela aidera les résidents en aval’, alors le mandat opérationnel [du barrage] est de laisser la rivière revenir à son état naturel, » a-t-il dit au Journal, avant d’expliquer le processus plus en détails.
Sept réservoirs nordiques peuvent influencer le niveau de la rivière des Outaouais entre Rolphton et Fort-Coulonge. Six d’entre eux ont une capacité de stockage importante, mais ce n’est pas le cas du réservoir le plus
au sud, à Rapides-des-Joachims. Les réservoirs sont vidés pendant l’hiver pour
se préparer à la fonte printanière, pendant laquelle le plus d’eau possible est retenu dans le Nord afin d’atténuer les inondations en aval. Une fois que les réservoirs sont remplis jusqu’aux seuils maximaux, l’eau est lentement libérée. Les crues printanières ont généralement deux pointes : la première, lorsque le
ruissellement naturel qui s’accumule dans la rivière atteint un maximum et
la seconde, lorsque les réservoirs du nord commencent à libérer l’eau.
Contrairement aux réservoirs, les barrages ordinaires ont une capacité de rétention limitée et sont incapables de modifier de façon significative le débit de l’eau, de sorte qu’en période d’augmentation du volume, ils ajustent leurs vannes pour permettre à l’eau de passer au même rythme qu’elle arrive. Dans certaines régions, la rivière redevient ce qu’elle était avant l’existence des barrages. Les bas niveaux d’eau se produiront dans des tronçons où l’eau peut se déplacer rapidement en raison de la géomorphologie de la rivière.
« [Les barrages] ont pour mandat de veiller à ce que leurs activités n’aggravent en rien les inondations par
rapport à ce qui se serait
produit dans des conditions naturelles. Comme les niveaux d’eau sont artificiellement élevés en amont des barrages, il y a un effet en amont, de sorte que lorsque le débit augmente, les opérateurs abaissent leurs niveaux d’eau pour s’assurer que
toute inondation qui pourrait survenir en amont ne soit
pas plus importante que si
le barrage n’avait jamais existé », explique Sarich.
En raison des caractéristiques naturelles de la rivière (rétrécissement, obstructions, etc.), certains barrages peuvent avoir des effets de remous importants. Le reflux se produit lorsque l’écoulement de l’eau ralentit en raison d’un obstacle, ce qui l’empêche de se déplacer aussi rapidement qu’elle arrive. Ainsi, lorsque le débit est élevé, l’eau commence à s’accumuler et crée des niveaux d’eau très élevés en amont.
Imaginez deux morceaux de tuyau de la même longueur : un de 3 po de diamètre qui se rétrécit à 1 po et un autre qui reste 3 po. Si vous videz la même quantité d’eau dans chaque tuyau, l’eau s’écoulera sans problème à travers le tuyau de 3 po, mais se déplacera plus lentement et refluera dans celui qui a été réduit à 1 po. Le même effet se produit à certains barrages, comme à Bryson et à Rapides-des-Joachims.
« Par conséquent, à mesure que le débit de la rivière augmente, certaines centrales doivent abaisser leur niveau d’eau pour limiter les inondations dans les
collectivités situées loin en amont, en maintenant le niveau d’eau le plus près
possible de ce qu’il était avant la construction de la centrale », indique le site Web de la CPRRO. Toute tentative de retenir les eaux pourrait entraîner l’inondation des communautés en amont et endommager les infrastructures. En bref, des niveaux d’eau plus bas aident à lutter contre un important effet de refoulement.
L’effet de refoulement de l’installation des Rapides-des-Joachims peut se répercuter jusqu’à Mattawa (100 km plus loin), de sorte que ce petit réservoir est maintenu à la moitié de sa capacité au printemps pour donner un peu de répit aux communautés en aval, tout en minimisant les risques d’inondations. Une fois que
la probabilité d’inondation est réduite à Mattawa, ce réservoir est alors rempli à des niveaux normaux. « Ce sont les mêmes opérations depuis 1950 », a souligné
M. Sarich, indiquant ainsi que le CPRRO n’a rien changé à son processus cette année.
Les photos de quais entourés de terre sèche à Deux-Rivières, qui font partie du barrage/réservoir des Rapides, doivent être mises en perspective, affirme Sarich. « Ce n’est pas un réservoir sec, c’est une très petite partie sèche et la quantité d’eau qui pourrait y être emmagasinée est très petite. Si vous utilisiez ce réservoir pendant quelques jours, vous n’apporteriez presque aucun soulagement en aval, mais vous feriez certainement augmenter les niveaux d’inondation à Mattawa d’un demi-mètre. C’est la même chose dans toutes les localités : Rapides, Bryson, Chenaux et Chats Falls », a-t-il conclu.
Créée par les gouvernements du Canada, du Québec et de l’Ontario en 1983, la Commission a pour mandat « d’assurer la gestion intégrée des principaux réservoirs du bassin de la rivière des Outaouais », de protéger contre les inondations et de maintenir les intérêts des utilisateurs, notamment les producteurs hydroélectriques. Selon Sarich et Francis Labbé, conseiller média d’Hydro-Québec, les fortes précipitations de pluie et de neige sont responsables des graves inondations de cette année et les gestionnaires ne peuvent pas faire beaucoup plus pour prévenir le problème. Cependant, plusieurs régions, dont Mansfield et la MRC de Pontiac, ont réclamé des enquêtes indépendantes sur le système de gestion des rivières.