Le CISSSO verse 216 M$ par an au secteur privé

0
101
Meeting room

Le CISSSO critiqué pour des dépenses de 216 M$ dans le secteur privé
Tashi Farmilo

Publié dans le Journal du Pontiac le 7 mai 2025.

OUTAOUAIS – Le Centre intégré de santé et de services sociaux de l’Outaouais (CISSSO) dépense plus de 216 millions de dollars par année pour des services offerts par le secteur privé — une décision vivement critiquée par les syndicats, qui y voient une menace pour le système public, tandis que l’organisation défend cette approche comme étant nécessaire pour assurer les soins aux patients malgré la pénurie de personnel et les manques de ressources.

Le rapport financier annuel du CISSSO (AS-471) indique qu’une grande partie de ces dépenses est consacrée à des contrats de services privés, notamment avec des cliniques médicales spécialisées, des foyers de groupe, des soins à domicile et des remboursements pour des soins reçus à l’extérieur du Québec. Une autre tranche de 17 millions de dollars sert à l’embauche de travailleurs indépendants, comme des infirmières et des inhalothérapeutes, lorsque le personnel public est indisponible.

Selon les chefs syndicaux, ce recours au privé affaiblit le réseau public de santé et rend plus difficile l’embauche et la rétention de personnel qualifié. « C’est un démantèlement organisé de nos services publics », a déclaré Alfonso Ibarra Ramirez, président de la section outaouaise de la Confédération des syndicats nationaux (CSN). « On voit des politiques qui encouragent la privatisation et le sous-financement, et maintenant nous en payons tous le prix. »

Le CISSSO soutient que l’objectif n’est pas de privatiser les soins, mais de maintenir les services lorsque les ressources publiques sont insuffisantes. La région est
confrontée à plusieurs défis : pénurie de main-d’œuvre, listes d’attente, espace limité dans les hôpitaux — autant d’obstacles à la prestation des soins sans soutien externe.

« Par exemple, il nous arrive de louer des locaux et des équipes chirurgicales de cliniques privées pour effectuer des interventions que nous ne pouvons pas réaliser à l’interne », explique la porte-parole du CISSSO, Qeren Boua. « Ces ententes permettent dréduire les temps d’attente et d’assurer aux patients les soins dont ils ont besoin, surtout ceux qui ne nécessitent pas  d’hospitalisation. »

Mme Boua souligne que le CISSSO a réduit son recours à la main-d’œuvre indépendante de près de 50 % au cours des derniers mois, et continue de miser sur le recrutement local et international ainsi que sur la formation du
personnel en place.

Le gouvernement du Québec a adopté une loi visant à mettre fin à l’utilisation de travailleurs de la santé indépendants d’ici 2026. Le CISSSO sera parmi les dernières régions à appliquer ce changement, mais affirme qu’il est en voie d’atteindre cet objectif.
Entre-temps, la CSN demande que le système public cesse totalement de dépendre du secteur privé d’ici le 1er mai 2025. Dans un communiqué, les leaders syndicaux ont mis en garde contre les effets de la privatisation, qui ferait grimper les coûts pour les contribuables et mettrait en péril les services publics essentiels.

« Tout le monde est perdant avec la sous-traitance », a déclaré Alain Smolynecky, président du syndicat des travailleurs de la santé de l’Outaouais. « Nous perdons nos travailleurs qualifiés au profit du privé, et le public paie deux fois — par les impôts et par les frais privés. »