Dieu est mon droit

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Vous devez penser : « Est-ce que Didier aurait tourné casaque ? ». J’avoue qu’en
choisissant la devise de l’Angleterre (en français dans le texte original, parce que la langue de la cour et de l’aristocratie anglaises du XIe au XIVe siècle était le français, l’anglais étant réservé au petit peuple), j’ai voulu provoquer. Rien de méchant, mais suffisamment pour nous faire réfléchir à notre relation avec Albion.

En effet, faut-il le rappeler, le Canada est une monarchie parlementaire. Et si, quotidiennement, c’est l’aspect parlementaire qui domine la vie politique canadienne, il n’en reste pas moins qu’au-dessus de la tête de nos députés à la chambre des communes, et même au-dessus de celle de notre premier ministre, se tient une tête couronnée. En l’occurrence, celle de Charles, roi d’Angleterre.

Et nous avons beau clamer que nous sommes un pays indépendant, qui a gagné ses galons par le sacrifice de ses enfants, lors des guerres mondiales (souvenez du massacre de Vimy, encensé comme l’acte de naissance du Canada), les faits sont têtus : le roi d’Angleterre et souverain du Royaume, chef de l’Église anglicane, nomme le premier ministre du Canada et « sanctionne » les lois votées au Parlement à Ottawa.

Pour moi, cela constitue tout simplement une épée de Damoclès qui menace la démocratie canadienne. Et aujourd’hui, en 2025, pour nombre de Québécois et de Canadiens, il s’agit d’une incongruité, d’une anomalie dont on ne perçoit plus le sens. Les plus récents sondages montrent que près des deux tiers des Canadiens (et les trois quarts des Québécois) pensent qu’il faudrait reconsidérer les relations avec la Couronne britannique.

Et cela augmente chaque année.Certains défenseurs du statu quo arguent que le pays tient le coup face à tempêtes grâce à cette « stabilité », que cet assujettissement nous protège… contre quoi ? Les changements ? Qui a dit que les changements étaient mauvais ? Il n’existe pas de forme figée de démocratie, elle est un régime par définition protéiforme et évolutif. Au contraire, elle se doit d’évoluer avec son temps, comme les sociétés se transforment. Comment peut-on penser que le mode de fonctionnement des institutions politiques qui valait sous John A. McDonald puisse être pertinent au XXIe siècle ?

D’autres avancent que « Oh, Charles a les mêmes intérêts que nous pour les changements climatiques ou l’éducation, la diversité et l’inclusion, alors pourquoi ne pas le garder comme chef de l’état canadien ? ». Ou encore : « Cela ne change rien… ». Franchement, sont-ce des arguments ? Voulons que le modèle ultime d’être humain que nous présentons à nos enfants soit celui d’une personne, dont la principale qualité pour être chef est d’être le fils du roi ou de la reine précédent-e, à l’opposé
de la méritocratie que nous vantons tant ?