Chalk River : tout le monde en parle, mais personne n’écoute

0
358

Est-il encore nécessaire de vous raconter la triste histoire de Chalk River? Il était une fois, dans un pays lointain, aux confins du Pontiac, dans un petit village malchanceux, un géant nucléaire qui, fort de sa mauvaise foi, parvenait à obtenir, sans que l’on comprenne pourquoi, l’âme des terres de là-bas. S’il pouvait au moins s’agir d’une fiction, peut-être que la fin en serait heureuse comme dans les illustres souvenirs de nos contes d’enfants.

Malheureusement, c’est la réalité qui frappe et elle frappe fort. Malgré maints avis contestataires, le 9 janvier dernier, la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN) autorisait l’implantation d’un site d’enfouissement de déchets nucléaires sur l’ancien site de production d’énergie nucléaire de Chalk River. Nous devrions être rassurés puisque, selon les dires du Premier Ministre lui-même, la CCSN est un organisme privé indépendant qui « n’approuve les projets que s’il conclut qu’ils sont sûrs pour les Canadiens et pour l’environnement ». Pfiou! Moi qui croyais qu’il y avait des risques!

Pourtant, d’autres que moi semblent le croire également. Un regroupement de Premières Nations, des élus des deux côtés de la rivière et bon nombre de citoyens se leurrent eux aussi. Après deux accidents nucléaires majeurs sur le site de Chalk River, alors qu’une catastrophe nationale a été évitée de peu, la CCSN persiste à déclarer qu’il n’y a aucun danger, et ce, même si le projet est aujourd’hui contesté par plus de 100 municipalités, dont celles de Montréal et de Gatineau, en raison de risques potentiels pour l’environnement et la qualité de l’eau.

Sur ce site jugé sécuritaire, situé à environ un kilomètre de la rivière des Outaouais, en zone humide, on installerait un dépotoir d’une durée de vie de 550 ans prêt à accueillir des millions de tonnes de déchets nucléaires dont la majorité vont durer des milliers, voire des millions d’années. La sécurité du site est remise en question, la longévité du site est remise en question, le processus de sélection du site est compromis alors que de nombreux groupes impliqués n’ont été consultés qu’une fois les rapports rédigés.

Ce n’est même plus la transparence que je remets en cause ici puisqu’on sait tout ce qu’il y à savoir. Si les Laboratoires nucléaires canadiens mettent en place toutes les mesures d’atténuation et de suivi proposées, « ça va bien aller ». C’est la CCSN qui l’a dit. Mais, si la catastrophe a lieu, notre rivière sera radioactive pour de nombreuses années, des êtres humains seront condamnés. Ils paieront le prix du manque de jugement et personne ne pourra évoquer l’ignorance, pas même le gouvernement qui se retournera vers la CCSN pour lui demander des comptes à rendre… En toute innocence!