« Ca suffit ! » : retour au respect

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En ce début mai, Bernard Drainville, ministre de l’Éducation, annonçait une série de mesures visant à contrer l’intimidation et à renforcer le respect et le civisme dans les écoles du Québec. Dès septembre 2025, l’usage des téléphones cellulaires sera interdit sur le terrain de l’école, y compris durant les pauses et sur l’heure du dîner, et le vouvoiement sera de mise pour janvier 2026. Les jeunes seront amenés à s’adresser au personnel en utilisant les termes « Madame » ou « Monsieur ». Ils pourront être sanctionnés pour le non-respect de ces règles ou être amenés à écrire une lettre d’excuses, à offrir leurs services à l’école ou à accomplir des travaux communautaires.

Même si cela variait d’un enseignant à l’autre, lorsque je suis arrivée à Sieur-de-Coulonge, le « tu » était plutôt de mise et bon nombre d’élèves s’adressaient à leur enseignant en utilisant son prénom, voire le surnom par lequel il s’était présenté. Alors que le « vous » ne garantit pas nécessairement le respect, comme plusieurs détracteurs de la mesure le déclarent, le « tu », s’il fait sauter les barrières, n’est pas pour autant synonyme d’égalité. Par la familiarité qu’il instaure, il rapproche les gens – pour le meilleur et pour le pire – allant d’une proximité saine et souhaitable à un mépris regrettable. Vous en conviendrez, entre « Allez-VOUS faire foutre! » et « Va TE faire foutre! », la différence est de forme et non de fond.

Aujourd’hui, on s’attaque au ministre parce qu’il n’a pas su cerner l’essentiel. Il ne s’occuperait pas suffisamment de la vétusté des écoles ou de la pénurie de personnel qualifié. En plus de vingt ans d’enseignement cependant, la situation humaine dans nos écoles s’est dégradée. Les actes discriminatoires et violents sont en augmentation. L’insécurité pour les élèves et pour les membres du personnel n’est pas qu’une perception et l’intimidation, qu’elle soit cyber ou pas, fait partie du quotidien peu engageant de nombreux enfants malgré des ateliers de sensibilisation. S’il est normal que le gouvernement se mêle d’établir les programmes scolaires de notre progéniture, il me semble tout aussi normal qu’il ait son mot à dire quant aux règles de socialisation de ces derniers alors que le rôle de l’école n’a pas changé : instruire, socialiser et qualifier.

Je viens d’un pays où le vouvoiement de politesse s’appliquait; j’ai donc un parti pris, non pas pour que l’on dise « vous » à tout prix, mais pour qu’au-delà des conventions linguistiques, l’on s’engage pour une meilleure harmonie. C’est la première fois depuis longtemps qu’on met ainsi le respect de l’avant et juste pour ça, je tire mon chapeau au ministre qui a eu le courage de dire : ça suffit !