Dominique Bomans
Éditorialiste InvitéE
Guest Editorialist
Dominique Bomans
Éditorialiste InvitéE
Guest Editorialist
Voilà plus d’un an que je vis avec la Covid. Tout a commencé le 12 mars 2020 alors que mes fils m’annonçaient qu’ils n’iraient pas à l’école le lendemain pour cause de pandémie mondiale. Branle-bas de combat général! Alors que l’on repense mon travail à distance et que je m’ajuste tant bien que mal à cette
nouvelle réalité où mes propres repères sont bousculés, il me faut aussi m’adapter à la situation des enfants et composer avec l’anxiété généralisée. La maison est un chantier. Tout le monde y vit toute la journée. On tente tant bien que mal de s’y côtoyer et de s’organiser : deux au sous-sol, deux à l’étage, une connexion internet revigorée. On tente tous tant bien que mal d’y travailler sans se marcher sur les pieds. Ouf, c’est les vacances, même si celles-ci ne ressemblent à aucune autre, on peut enfin souffler!
Puis, l’équilibre s’établit. C’est sûr, rien ne sera plus pareil. Sur le pas de
l’école, j’embrasse mon fils. Je le regarde s’en aller, un peu plus inquiète qu’à l’habitude. Il se retourne, main dans les airs, visage masqué. Sur le retour, un peu fataliste, je croise les « ça va bien aller » pendant que je me demande dans quel monde il est né. J’enseigne cette session à l’université, un cours, Éducation et changement social, à croire que c’était planifié. J’apprends, tout en l’enseignant, que le changement entraîne toujours une forme de résistance. J’apprends aussi que ce concept si bien ancré de « résistance au changement » est suranné. Il met en cause l’individu, sa paresse, son entêtement, son manque d’imagination, alors que cette fameuse résistance serait plutôt la manifestation de ses préoccupations qui, lorsqu’elles sont pris en considération, deviennent les moteurs des changements à venir.
Plus d’une année s’est écoulée depuis le 13 mars 2020. Grâce aux vaccins,
on pourra bientôt enlever nos masques. On pourra bientôt se rassembler sans aucune limitation du nombre de personnes autorisées. Les enfants
pourront s’offrir une rentrée scolaire presqu’ordinaire et l’on rêve de notre vie normale d’avant. Mais, pour un temps, les bruits s’étaient arrêtés, la terre avait pu se reposer. Pour un temps, on s’était moins déplacé, on avait moins acheté. Certains avaient même pu économiser. Pour un temps, on avait arrêté de
voyager cinq fois par année, on s’était contenté de petites promenades-santé. On s’est rendu compte que tout un pan de notre société n’était plus respecté. Par la force des choses, le temps d’une pandémie, on a remué quelques habitudes de vie; on s’est préoccupé, on s’est intéressé. Pour un temps, on a presque changé.