Happy St. John’s Day!

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Est-ce un acte de provocation politique de fêter la Saint-Jean dans le Pontiac ? J’espère que non, mais écrire un éditorial sur la situation des francophones dans le Pontiac à la veille de la St-Jean est délicat, car, pour l’avoir maintes fois constaté par le passé, quel que soit le ton utilisé, il est impossible de faire l’unanimité.

En tant qu’étrangère francophone ayant regagné le Québec par la voie du Pontiac après avoir séjourné en Ontario, le fait français dans cette région enclavée m’a tout de suite intriguée. L’isolement géographique de la région pontissoise par rapport au
reste du Québec, alors qu’une route entre Sheenboro et le Témiscamingue a déjà été évoquée, mais jamais aménagée, exacerbe certains des enjeux linguistiques dont les francophones ont fait et font encore les frais.

Au recensement de 1996, le taux de bilinguisme des francophones du Pontiac était de 83 %, celui des anglophones de 27 % seulement. Au dernier recensement de 2016, ce taux atteignait 85 % chez les francophones pour 28 % chez les anglophones. Qu’il soit additif ou soustractif, il ressort de ces chiffres que le bilinguisme demeure de loin l’apanage des francophones du Pontiac alors que 97 % des jeunes adultes francophones de la région se disaient capables, en 2016, de soutenir une conversation en anglais. Est-ce parce qu’assimilés, c’est ce qu’ils ont appris à faire depuis tant d’années ? En 2016, la population qui parlait le français comme langue d’usage était 16, 5 % inférieure à celle qui avait reçu le français comme langue maternelle. Ce n’est pas alarmiste de constater que, dans le Pontiac, beaucoup de choses se passent en anglais, y compris pour celles et ceux qui parlent français.

Pour cet état de fait, on peut blâmer l’Église. On peut blâmer l’école. On peut blâmer les deux. On peut blâmer les Irlandais. On peut blâmer les Canadiens français ou bien les deux. On peut blâmer l’Histoire, certes, mais on ne peut l’ignorer. L’histoire des francophones du Pontiac ressemble à s’y méprendre à celles des minorités francophones du Canada anglais alors que leurs manuels étaient écrits en anglais, qu’au vu et au su du Département de l’instruction publique, l’instruction pontissoise se passait essentiellement en anglais, que le bilinguisme prôné, et même subventionné, n’était que poudre aux yeux et que le français restait second sur tous les plans, y compris celui de l’enseignement.

Aujourd’hui, le français dans le Pontiac n’est pas plus menacé qu’il ne l’était hier alors que la bonne entente règne encore comme elle régnait autrefois. Mais l’histoire des
francophones du Pontiac devrait se raconter dans toutes les municipalités du comté, en français et en anglais, pour que vive la St-Jean. La cohabitation est plutôt belle à voir tant qu’elle n’efface pas les mémoires.