Prenez la parole pour que le Pontiac ait une voix

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Il y a plus de vingt ans, je posais mes valises dans le Pontiac, d’abord à Luskville, puis à Quyon, enfin à Campbell’s Bay, loin, de plus en plus loin du centre urbain. J’accouchais à Shawville dans une des trois chambres de maternité confortablement aménagées : un gros canapé rembourré, une salle de bain privée, de l’espace à revendre et un lit pour accoucher. J’avais eu la chance de faire la visite des lieux qui m’avaient été présentés avec une immense fierté. L’hôpital de Shawville était à la pointe des tendances en maternité. Puis, les années ont passé. Les médecins ont quitté : des anesthésistes, des spécialistes et des médecins de famille. Si je cherche aujourd’hui des informations sur ce fleuron de la région, je comprends qu’il fournit des soins médicaux généraux et plus spécialisés, mais que si les femmes veulent accoucher, il faut qu’elles le fassent ailleurs, loin, de plus en plus loin, vers les centres urbains.

À la naissance de ce premier enfant, j’ai connu quelques défis, celui-ci ne faisant pas ses nuits. De la fatigue à l’épuisement, j’ai eu besoin d’aide, surtout que ma famille était loin. Grâce au CLSC et à son équipe de proximité dont les visages m’étaient familiers, je me suis retrouvée entourée. J’ai même été suivie par un psychothérapeute en or qui m’a finalement annoncé qu’il s’en allait ouvrir son propre cabinet, près, très près du centre urbain, trop loin pour moi. Après lui, il y a eu un autre psychothérapeute, parti, lui aussi, au bout de deux mois, puis une psychoéducatrice, qui a peut-être choisi de rester, mais qui ne pouvait pas soigner. C’est donc moi qui ai quitté. Ensuite, le CLSC de Fort-Coulonge a réduit ses heures et celui de Bryson a fermé ses portes. En matière de santé physique ou mentale, ce n’était plus très facile de « consommer local ».

Dans une région déjà marginalisée où de l’autre côté de la frontière, tout semble plus vert, investir dans des services de proximité est la condition première pour consolider la cohésion de toute une communauté. Au fil des années, j’en ai vu des gens s’installer. Mais, fatigués de ne pas trouver ce qu’ils cherchaient ici, ces amis sont partis et mon tissu social a éclaté. J’ai fini par me sentir isolée dans un comté de plus de 14 000 kilomètres carrés.

À la veille des élections municipales, les quatre candidats promettent chacun de faire des pieds et des mains pour que le Pontiac soit reconnu ailleurs. J’espère qu’ils auront à cœur d’investir dans les infrastructures de proximité, non pas par nostalgie du passé, mais bien pour miser sur l’avenir. Ce sont aussi vos récits de vie qui peuvent les y guider.