Forum santé : écart de 348 M$

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Forum Santé : l’Outaouais dénonce un écart de 348 M$

Publié dans le Journal du Pontiac du 24 septembre 2025.

Tashi Farmilo

GATINEAU – Le sous-financement chronique des services de santé et sociaux en Outaouais a occupé le devant de la scène le 18 septembre lors d’un forum public à la Maison du citoyen de Gatineau. Des élus, des travailleurs de la santé et des organisations locales se sont réunis pour le Forum Santé Outaouais 2025 afin de réclamer un financement équitable et un plus grand contrôle sur la façon dont les soins sont dispensés. Le message était clair : l’Outaouais est laissé pour compte.

Organisé par Action Santé Outaouais, l’AQDR Outaouais et la Conférence des préfets de l’Outaouais, le forum a mis en lumière un chiffre qui a donné le ton : 348 millions de dollars. C’est le manque à gagner estimé chaque année pour la région comparativement aux autres régions du Québec. Les intervenants ont lié cet écart aux difficultés quotidiennes vécues par les résidents lorsqu’ils tentent d’obtenir des soins.

Cinq leaders régionaux ont pris la parole : la mairesse de Gatineau, Mme Maude Marquis-Bissonnette, et les préfets Mme Chantal Lamarche (MRC Vallée-de-la-Gatineau), M. Marc Carrière (MRC des Collines), Mme Jane Toller (MRC Pontiac) et M. Paul-André David (MRC Papineau). Tous ont souligné que la population croît, que les besoins augmentent, mais que le personnel et les services nécessaires ne suivent pas. Ils ont réclamé des décisions prises localement et un financement qui reflète la réalité de la région.

M. Steve Brabant, directeur général du Cégep de l’Outaouais, et Mme Murielle Laberge, rectrice de l’Université du Québec en Outaouais, ont insisté sur la nécessité d’investissements à long terme dans la formation du personnel de santé. Le Dr Marc Bilodeau, PDG du CISSS de l’Outaouais, a reconnu les efforts déployés mais admis que la pénurie est grave, avec plus de 1 400 postes vacants.

Dans le Pontiac, 80 % des résidents se rendent désormais en Ontario pour recevoir des soins. Mme Toller a qualifié la fermeture de l’obstétrique dans le Pontiac d’inacceptable, obligeant les femmes à accoucher à Pembroke ou à Gatineau. Davantage de césariennes sont planifiées pour tenir compte des longs déplacements. « Les femmes ont le droit d’accoucher là où elles vivent », a-t-elle affirmé, en promettant de se battre pour rétablir les services de maternité.

Les soins aux aînés constituent un autre enjeu majeur : la région accuse déjà un manque de près de 400 lits de soins de longue durée, un déficit qui devrait atteindre 1 400 d’ici 2040. L’Outaouais se classe aussi dernier au Québec pour le nombre d’heures de soins à domicile financés par l’État. Avec trop peu de médecins de famille, plusieurs aînés peinent à demeurer à domicile.

Les services de santé mentale ont été décrits comme fragmentés et sous-financés, surtout en dehors de Gatineau. Les organismes communautaires sont débordés, avec de longues listes d’attente et un financement instable, tandis que les milieux ruraux doivent composer avec l’éloignement, le transport et la langue.

Les participants ont proposé des solutions locales : créer des tables de planification dotées d’un véritable pouvoir décisionnel, développer un pôle d’innovation pour l’embauche et la recherche, élargir les programmes de formation, offrir des incitatifs au logement pour le personnel, mieux reconnaître les professionnels formés à l’étranger et établir des passerelles claires de l’école secondaire et du cégep vers les carrières en santé.

D’autres recommandations comprenaient le retour d’un pouvoir décisionnel aux CLSC, notamment dans les communautés éloignées et autochtones ; des logements coopératifs et des heures garanties de soins à domicile pour les aînés ; et, en santé mentale, un financement stable pour les groupes communautaires, des équipes mobiles de crise et de meilleurs liens entre les écoles, les cliniques et les services jeunesse.